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Une société avait conclu, avec l’ensemble des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, un accord collectif relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).
Cet accord contenait une disposition intitulée « maintien de l’emploi à travers le traitement social des pertes de marchés ». L’employeur s’y engageait, pendant la durée de validité de l’accord, à ne pas procéder à des licenciements économiques, sous condition. Cette condition étant que les salariés occupant certains emplois soumis à des pertes de marché devaient accepter les éventuels aménagements relatifs à la durée du travail, à ses modalités d’organisation et de répartition, à la rémunération et au lieu de travail.
Un syndicat avait saisi le tribunal de grande instance pour demander l’annulation de cette disposition. Le syndicat considérait qu’il s’agissait d’un accord de maintien de l’emploi, qui ne remplissait pas les conditions de fond et de forme requises pour un tel accord.
De son côté, l’employeur estimait qu’il n’était pas en tort, dans la mesure où il ne s’agissait pas d’un accord de maintien de l’emploi, mais d’un accord conclu dans le cadre de la négociation triennale sur la GPEC. Il mettait en avant l’objectif de ce dispositif : assurer le maintien de l’emploi, moyennant la mobilité interne des salariés facilitée par diverses mesures d’accompagnement. En effet, l’activité de l’entreprise étant régulièrement affectée par la perte de marchés, elle impliquait la réaffectation des salariés sur d’autres sites. Le dispositif en question visait donc à faire face à cette situation en offrant aux salariés diverses garanties en vue de leur réaffectation à proximité de leur domicile ou de leur reclassement sur un site plus éloigné.
Les juges du fond n’ont pas été sensibles à l’argumentaire de l’employeur. Faisant abstraction de la qualification donnée à l’accord, ils ont donné gain de cause au syndicat.
Leur décision a été approuvée par la Cour de cassation qui rappelle deux principes fondamentaux :
Pour la Cour de cassation, cela implique qu’en principe, un accord collectif ne peut pas :
Or, dans cette affaire, les juges du fond avaient constaté que le dispositif contesté prévoyait que le salarié ayant refusé, à la suite d’une perte de marché, la modification de son contrat de travail résultant de l’application de l’accord collectif, ferait l’objet d’un licenciement pour motif économique, la procédure applicable devant être celle d’un licenciement individuel.
Par conséquent, ces dispositions étaient nulles.
Cour de cassation, chambre sociale, 16 février 2022, n° 20-17.644 (un accord collectif ne peut modifier, sans l’accord des salariés concernés, les droits qu’ils tiennent de leur contrat de travail)
Marie Coste
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